Un village du Var, du côté de la Sainte-Baume. Les parfums de la garrigue, le vacarme des insectes. La lumière. Deux femmes vivent là, partagent dans la paix, dans l'amour, les jours et les nuits. Pas bien loin, au coeur d'une grande maison entourée d'un jardin, s'est retiré un homme. Un homme d'une dimension rare, par la richesse d'esprit comme par la force de coeur qui émane de sa personne. Il semble que cet homme sera susceptible, de son gré ou non, de désunir les deux amantes. Mais il existe encore, de nos jours, des accords absolus, qu'aucun hasard ne peut briser.
C’est un drôle de roman, et après l'avoir lu assez avidement, je peux dire que c’est une belle histoire que Jocelyne François nous raconte.
Il faut que je commence par le début. Figurez-vous que le début c’est une recommandation sur Youtube pour une vidéo de l’INA : « Être Gay en 1984 » ; je remarque en jetant un coup d’œil que c’est une vidéo d’1h30 ; honnête avec moi, je pense que je vais juste visionner les 15 premières minutes et revenir finir le reste au compte-goutte. Eh bien non, j’ai trouvé la conversation assez agréable à suivre, et puis surtout j’ai été happée, immédiatement, par l’aura de cette dame au milieu de tous ces hommes : douce dans le ton mais ferme dans ses propos, calme mais articulée, presque pudique mais sans honte aucune. Ni une ni deux, je crois comprendre qu’elle est écrivaine, qu’elle a même publié un roman un peu autobiographique qui relatent sa relation de longueur durée avec sa compagne. Je cherche à acheter le roman en question il est temporaire en rupture de stock, je me rabats sur Les Amantes en attendant de recevoir plus tard Joue-moi « España ». (Mille excuses pour la digression)
Qu’en est-il ? Les trente premières pages m’ont désarçonnée, le titre m’annonçait déjà l’amour, la quatrième de couverture était encore plus prometteuse. Il devait s’agir d’un amour au féminin. Mais les pages qui se succédaient n’étaient consacrées qu’à un « lui » / « il », la première rencontre du personnage principal (jamais nommée) avec « Lui », leurs retrouvailles multiples, leurs échanges, leur fusion. Mais où étaient donc les « Amantes » ?
Jusqu’à l’allusion, d’abord, à une « bien-aimée », puis son apparition progressive dans l’espace du roman : Sarah. La première femme et la seule (qui compte) un peu comme la Sarah d’Abraham, je m’égare encore (des vieux cours de Caté refont surface). Sarah qui représente la maison, Sarah qui est sa famille. Et tout le long du récit, au moins pour une grande part, le doute, l’ambiguïté s’installe quant à la nature de la relation avec ce « Il » qui semble si incontournable, si magnétique pour le personnage principal. S’agit-il d’un triangle amoureux ?
Mon avis en peu de mots :
Ce n’est pas un roman facile à aborder, il n’est pas long (quelques 210 pages) mais il est soutenu et il prend une forme qui pourrait peut-être mettre mal à l’aise. On suit, sur 6 années à peu près (si j'ai bien compté), les souvenirs et la pensée du personnage principale. Tout n’est dit que par son prisme à elle. J’avoue donc parfois avoir trouvé cela frustrant de ne pas avoir le point de vue de Sarah. C’est aussi un récit riche en réflexions quasi philosophiques sur l’amour, l’amitié, la jalousie, la conjugalité et la création artistique. Cette profusion réflexive laisse parfois une part trop maigre à la narration.
Mais j’ai été ravie de retrouver dans l’œuvre, ce qu’il y avait de si intuitivement touchant pour moi chez Jocelyne François lors de l’interview. Il y a des passages absolument magnifiques par leur justesse et leur couleur, tellement beaux que je devais prendre une pause pour m’en délecter. Bref... Vraiment, j’ai hâte de lire le reste de son œuvre.
Pardon, c’est long.
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