Une famille anglaise plutôt aisée, les Gordon, attend un enfant. Ils désirent tellement un garçon qu'ils se créent un fantasme. A la naissance, ils sont surpris de découvrir qu'il s'agit d'une fille et l'appellent Stephen, un nom masculin. Au fur et à mesure que le bébé grandit, sa silhouette se dessine, ses épaules sont larges, son bassin étroit et il ressemble de façon frappante à son père. Très tôt, Stephen s'intéresse aux armes, à la chasse et désire monter à califourchon, comme le font les garçons. Sa personnalité se dessine, elle est forte, courageuse et n'arrive pas à se résoudre à nouer ses cheveux avec des rubans ou porter de jolies petites robes. Plus tard, elle tombera amoureuse d'une femme. Malgré son mérite en tant qu'écrivain, ses services loyaux durant la guerre, son moral d'acier et sa force tranquille, elle sera rejetée durant sa vie entière. Le Puits de Solitude nous narre la douloureuse et difficile existence d'une lesbienne dans la vieille Angleterre.
Le roman s'achève sur ces phrases : « Reconnaissez-nous, oh Dieu, devant le monde entier ! Concédez-nous, à nous aussi, le droit à l'existence ! »
Très beau roman, je ne l'ai lu qu'une fois alors peut-être, comme cela m'arrive parfois, qu'une seconde lecture me fera voir toutes ses imperfections... Tout d'abord j'avais décidé de lire le livre à cause d'un avis extrêmement négatif et pas de n'importe qui, de Virginia Woolf, qui dans son journal juge ce roman illisible. Alors certes Hall et Woolf sont à mille lieues l'une de l'autre, il n'en demeure pas moins que les deux sont brillantes, mais différement.
Pourquoi j'ai autant aimé le roman ? Je me suis reconnue parfois en Stephen, je ne pense pas être aussi "garçon manqué" qu'elle, loin de là, mais dans son caractère, dans sa manière d'être pudique. De plus c'est le genre de personnage auquel on ne peut que s'attacher, parce qu'alors même qu'elle sait à quelle point l'Homme peut être mauvais, elle ne cesse de faire preuve d'humanisme et d'abnégation.
Alors sa grande histoire d'amour avec Mary, est sublime, j'ai trouvé ça très bien écrit (et oui, je contredis l'une de mes icônes littéraires). La description de leur relation qui s'englue dans la vie quotidienne dans le Paris des années 20, et le triangle amoureux (quoi qu'on puisse débattre sur le fait que Mary aime Martin) qui éloigne les deux femmes le jour, mais ne brise par leur intimité, tout s'enchaîne harmonieusement. Bref le roman est bien charpenté, je trouve.
Le titre n'est pas anodin, le récit est extêmement triste. Autant que vous le sachiez avant de commencer votre lecture, Stephen est condamné à la solitude, c'est le personnage Romantique par excellence et dans ce sens Hall renoue avec la tradition Romantique du XIX siècle, en nous décrivant un personnage marginal, Stephen est née au mauvais moment et par conséquent elle est "La victime et le bourreau- Un de ces grands abandonnés / Au rire éternel condamnés, /Et qui ne peuvent plus sourire " pour reprendre Baudelaire.
Lisez-le, on est d'ailleurs très vite pris dans la lecture. Je devrais moi aussi me replonger dedans une seconde fois.
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